J’ai une copine qui a l’impression d’être née entre deux générations.
Pourtant elle a tout pile l’âge officiel et démographique du concept générationnel : 25 ans. Sauf que depuis presque une décennie, elle a l’impression de ne jamais rencontrer ses pairs millésimés 1983. Bien sûr il y a ses copines des petites classes, qu’elle a la chance d’avoir toujours à ses côtés. Comme elles sont entrées au CP en même temps, elles ont le même âge. Mais en dehors de l’école primaire de son village, où se cachent tous ces jeunes gens qui vont fêter leur quart de siècle cette année ? Elle en rencontre pourtant plein, des gens, ma copine. D’un premier coup d’œil elle tente de soupeser le passé de ses interlocuteurs en nombre d’années. Et puis les masques tombent : « quand j’ai passé le bac il y a deux ans… », « je suis en fac de socio… 1ère année, pourquoi ? », « ma grande sœur, qui a 21 ans… »… Ma copine a la fâcheuse tendance à s’aguicher de jeunes hommes. Très jeunes, trop jeunes. On dit que l’amour n’a pas d’âge ? Elle commence à penser que l’amour qui marche, si. Et il ne peut pas être plus jeune qu’elle. Récemment la roue du temps a tourné. Presque la trentaine. Un homme, un vrai ! Avec des diplômes en poche, un appartement à lui avec grille-pain, four, plantes vertes et machine à laver. Et des fiches de paie qui dépassent le montant des indemnités forfaitaires de stagiaire. Elle s’est laissée choir avec volupté dans ces grands bras protecteurs. Sans rien connaître de son passé, elle s’est quand même dit que l’expérience a du bon. Il avait l’air de savoir. Savoir faire, savoir dire. Jusqu’au soir où l’expérience a trop parlé : « hey bichette, toi à trente ans, tu seras au top, tu sais ! » Décidément, même à trente ans on y connaît toujours rien.